Le 17 avril 2011, les Meyrinois élisaient pour la première fois un Vert au Conseil administratif en la personne de Pierre-Alain Tschudi. Elu en deuxième position derrière Monique Boget, socialiste, et devant Jean-Marc Devaud, démocrate-chrétien, il lui revient donc cette année d’assumer, à partir du 1er juin 2012, la fonction de maire. Il entame ainsi sa seconde année au sein du Conseil administratif. Nous avons souhaité lui poser quelques questions à cette occasion, histoire de tirer un premier bilan au bout d’une année au sein de l’exécutif meyrinois et de connaître ses intentions pour cette année de maire.
La Feuille verte : Qu’est-ce qui a changé pour toi au cours de cette année au Conseil administratif hormis quelques cheveux blancs en plus ?
Pierre-Alain Tschudi : Les cheveux blancs sont le signe que le temps passe. Au Conseil administratif, il passe encore plus vite. On ne voit d’ailleurs plus le temps passer, parce qu’on est amené, au cours d’une journée, à se préoccuper de très nombreuses questions extrêmement variées qui, même si elles ne sont pas toutes primordiales à l’échelle de la commune, ont en revanche chacune une grande importance au moins pour quelques uns de nos concitoyens. Je m’efforce donc, dans la mesure de mes moyens, de n’en négliger aucune.
La Feuille verte : Et alors arrives-tu à résoudre ces questions ?
PAT : Nous vivons en société, c’est donc toujours à plusieurs que les questions se résolvent. Un conseiller administratif n’a que très peu de pouvoir, d’abord parce qu’à Genève, les communes ont très peu de compétences, ensuite parce qu’il dépend des crédits que le Conseil municipal accepte de voter. En revanche, un conseiller administratif a de l’influence et donc une responsabilité particulière. Sa tâche principale réside dans le fait de convaincre, convaincre les communiers, le Conseil municipal, l’Etat de Genève, etc. Pour faire avancer un projet, résoudre un problème, il faut avoir la volonté de trouver un accord entre toutes les personnes concernées. Pour y parvenir, il faut être capable de comprendre l’autre et de trouver avec les autres la meilleure solution possible dans l’intérêt général, y compris celui des générations futures. Cela requiert d’abord de l’écoute, une disponibilité au dialogue, du plaisir à échanger avec les autres, de la patience, mais aussi de la ténacité et la volonté de se battre pour défendre ses valeurs et ses convictions profondes.
J’aime débattre et échanger des idées, défendre des projets qui me tiennent à cœur, mais j’aime surtout aussi le faire en collaboration avec les autres. En fait, c’est ce que j’ai toujours aimé faire, mais que j’ai maintenant le privilège de faire à plein temps et, de plus, avec des collaboratrices et collaborateurs très motivés en engagés, ainsi qu’avec des collègues qui ne partagent peut-être pas toujours les mêmes idées, mais qui ont la même volonté de servir la collectivité meyrinoise.
La Feuille verte : Quelles sont tes priorités ?
PAT : Ayant en charge les aîné-e-s, la sécurité, l’urbanisme, l’aménagement du territoire et les travaux publics, mes priorités sont dictées en partie par les responsabilités qui m’ont été confiées. Mais de façon plus générale, mes priorités sont surtout dictées par la situation préoccupante de notre planète. Les changements climatiques, le tarissement des énergies fossiles, la situation préoccupante de l’eau, la perte de la biodiversité, la détérioration de la qualité de vie dans les villes exigent une réorientation rapide de notre mode de produire, de consommer et de vivre. Nous traversons la pire crise économique et écologique que le monde ait connue. Cette crise est de plus source de conflits majeurs. Seule une prise de conscience planétaire et une volonté partagée de trouver des solutions ensemble permettra de s’en sortir. Et surtout une prise de conscience que chacune et chacun doit contribuer à cet effort commun. De toute évidence, cela est aussi une priorité pour Meyrin. Mais je reste convaincu que ce défi que nous nous devons de relever est aussi une chance, celle de pouvoir inventer, créer, construire ensemble une vie économique et sociale saine, de retrouver une meilleure qualité de vie en réalisant de nouveaux logements chez nous, en remettant de la nature en ville, en recréant des liens de solidarités quelque peu perdus. Les entreprises prêtes à contribuer à relever ces défis et à s’engager dans un développement durable sont aussi créatrices d’emplois. L’éco-quartier des Vergers est aujourd’hui le projet phare de la commune qui suscite une attente énorme et beaucoup d’enthousiasme. Ce quartier modèle doit trouver sa place dans une ville de Meyrin qui s’engage toute entière pour devenir une ville durable.
La Feuille verte : Qu’est-ce que c’est qu’une ville durable ?
PAT : Une ville durable c’est une ville dense qui s’oppose à la dispersion spatiale, source de gaspillage des terres agricoles, de destruction du paysage, de problèmes de mobilité et de pollution. Meyrin a suffisamment sacrifié sa zone agricole. Désormais, les nouveaux logements se construiront à l’intérieur des zones habitées, par des surélévations essentiellement. Et nous aurons besoin de nouveaux logements. Nos enfants se plaisent tellement à Meyrin. N’est-ce pas un peu notre faute ?
Une ville durable c’est une ville qui préserve la biodiversité et met de la nature en ville, favorisent la création de potagers urbains entre les immeubles, réhabilitent le Jardin alpin, réalisent le Lac des Vernes, le parc arborisé au cœur de la cité, une ville où l’on découvre, au gré des promenades, des plantes et des légumes dont on avait oublié l’existence, où les hiboux ( et non pas les motos) nous empêchent de dormir.
Une ville durable, c’est une ville qui s’engage à réduire ses émissions de CO2, qui augmente l’efficacité énergétique des bâtiments et autres installations, qui produit et consomme des énergies renouvelables. Meyrin est une ville qui a un potentiel énorme de production d’énergie solaire.
Une ville durable, c’est une ville qui développe une mobilité saine et respectueuse de l’environnement, qui assure à ses habitants des déplacements à vélo, à pied et en transports publics en toute sécurité.
Une ville durable, c’est une ville qui se préoccupe de ses cours d’eau et de sa nappe phréatique, qui sépare les eaux pluviales des eaux usées afin que ces dernières ne soient pas déversées directement dans nos rivières les jours de fortes crues. Aujourd’hui le Lac des Vernes des Vernes est une urgence pour tous ceux qui se préoccupent de l’eau indispensable à la vie.
Une ville durable c’est une ville solidaire où les citoyennes et les citoyens s’engagent, se soutiennent, s’entraident et donnent aux collectivités publiques les moyens de rendre leur dignité aux victimes de notre société, bref où les habitants prennent soin de leurs voisins et de leur environnement.
Une ville durable c’est une ville qui crée de l’emploi durable, accueille des entreprises qui se préoccupent du devenir de notre planète.
Une ville durable c’est une ville qui trie ses déchets et qui en produit le moins possible.
Une ville durable c’est une ville ouvertes qui échangent avec d’autres villes durables, qui partagent des expériences et des savoirs parce qu’on est jamais intelligent tout seul.
Une ville durable c’est ……..
La Feuille verte : Heuh, et ton année de maire comment l’envisages-tu ?
PAT : Je n’ai aucune expérience de maire, mais a priori cela ne va pas changer grand-chose à mes engagements. Le Conseil administratif est une équipe collégiale qui partage ses préoccupations et décident ensemble. Le maire est plus fortement sollicité par les habitants, les médias, les associations. Je compte donc profiter de ces sollicitations pour entendre les préoccupations des Meyrinois-es et échanger sur le devenir de Meyrin. Cela dit, c’est déjà ce que j’ai cherché à faire cette année. Je profiterai du cinquantenaire de la ville de Meyrin pour rendre hommage aux pionniers. En effet, Meyrin est devenue ville il y aura 50 ans en 2013. Elle n’est pas seulement devenue ville parce qu’elle a atteint 10'000 habitants, mais parce que les habitants d’alors ont décidé d’en faire une ville plutôt qu’une cité-dortoir et se sont engagés, se sont investis dans des associations, des groupes d’habitants et ont mis de la vie dans la ville. Mon objectif sera d’échanger avec les concitoyens pour que, riche de l’expérience de notre Histoire, nous écrivions ensemble de nouvelles pages de l’Histoire meyrinoise. Personne ne doit manquer à l’appel pour créer la ville durable. Pour remettre la nature en ville, nous avons besoin de l’expérience et des compétences des agriculteurs ; pour développer les nouvelles solidarités et créer des réseaux d’entraide nous avons besoin de l’expérience associative des aînés, ainsi que la force et le dynamisme des jeunes, pour relever les défis énergétiques, nous avons besoin de l’inventivité et de la créativité des chercheurs, des entrepreneurs, des constructeurs, pour mettre du plaisir, de l’intelligence et de la vie dans la ville, nous avons besoin des initiatives et des idées de toutes et de tous.
La Feuille verte : Merci de cet entretien et bon courage pour ton année de maire.