Madame la Directrice,
chers élèves que nous fêtons aujourd’hui,
chers parents,
chers enseignant-e-s , donc chers collègues,
Je prie les adultes de ne pas faire trop de bruit pour que les élèves à qui s’adresseront plus particulièrement mes quelques propos puissent bien m’entendre.
En effet, si le maire que je suis aussi, en dehors d’être prof d’allemand et d’histoire, fait un petit discours ce soir c’est pour souligner que cette manifestation marque une étape importante de votre vie qui mérite qu’on s’y attarde un bref instant.
Jusqu’à présent, vous avez suivi votre scolarité sur le territoire communal, d’abord à l’école primaire, puis ces trois dernières années au cycle. Là, vous allez prendre en quelques sortes votre envol et poursuivre votre parcours de formation ailleurs. Votre champ d’action va s’étendre au-delà des frontières communales, mais la Commune ne souhaite pas que vous lui tourniez le dos. Elle souhaite au contraire que vous mettiez à profit vos connaissances acquises au cours de votre scolarité pour le bien de la collectivité. Votre Commune, notre ville de Meyrin, a besoin de la participation de ses habitants pour bénéficier d’un cadre de vie dans lequel tous se sentent bien. Vous pouvez y contribuer et ainsi consolider les liens que vous avez tissés avec Meyrin. Vous auriez peut-être aimé que je vous dise ce que la Commune pouvait vous apporter.
Je préfère m’adresser aux jeunes responsables que vous êtes pour évoquer ce que vous pouvez apporter à votre ville, pour vous inviter à vous impliquer, à participer, plutôt qu’à vous en remettre aux autres. 14 ans c’est l’âge parfait pour cela.
Permettez-moi de vous dire deux mots d’un grand bonhomme qui a été assassiné il y a 70 ans. Janucz Korczak était avant la deuxième guerre mondiale une personnalité très connue, il était médecin- pédiatre, écrivain. Il est aussi un précurseur reconnu de la mise en pratique des droits de l’enfant. Le jour où les enfants juifs de l’orphelinat qu’il dirigeait sont enfermés dans le ghetto de Varsovie, il ne les abandonne pas, il se battra chaque jour pour leur trouver de la nourriture et leur prodiguer des soins. Et lorsque ces enfants seront emmenés au camp d’extermination de Treblinka, il refusera à nouveau de les abandonner et sera exterminé avec eux. On retrouvera après la guerre, son journal. Il y notait volontiers ses pensées à 6 heures du matin dans son lit quand les enfants dormaient encore. Un matin, il se souvient de ses 14 ans. Il écrit: Quatorze ans, je regarde autour de moi, je distingue, je vois. Mes yeux devaient s’ouvrir et ils se sont ouverts. J’existais non pour être aimé et admiré, mais pour agir et aimer moi-même. Il ne s’agissait plus d’être protégé par les miens, mais d’un devoir pour moi de prendre soin du monde et de l’homme. Et Janucz Korczak s’est ensuite engagé toute sa vie pour les autres. Aujourd’hui, 70 ans après sa mort tragique, le monde entier se souvient de lui.
Ce qu’il écrit dans le ghetto de Varsovie sur ses 14 ans, c’est ce que vous vivez vous élèves de fin de 11ème Harmos aujourd’hui. Enfant, vous demandiez à être protégé par vos parents, vos enseignants, être aimé de tous, aujourd’hui, vous revendiquez plutôt votre indépendance, vous êtes en âge d’agir, d’aimer et de prendre soin du monde et des autres. Et les autres et le monde ont besoin de votre engagement, car le monde ne va pas bien.
La semaine dernière, les gouvernements des pays de la planète se sont réunis à Rio de Janeiro.
Ils étaient tous d’accord sur les constats: la perte de biodiversité, le réchauffement climatique, la dégradation de l’eau, auront des conséquences dramatiques si l’on ne fait rien, mais ils n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur les mesures efficaces à prendre. Brittany Tillford, une jeune fille néo-zélandaises, à peine plus âgée que vous a eu les courage d’interpeller les chefs d’Etat. Et leur a dit : « Je suis là pour me battre pour notre avenir. Demandez vous pourquoi vous êtes là. Pour sauver la face ou nous sauver ? » Aujourd’hui, Brittany et nous tous le savons, Nous ne pouvons pas compter sur les gouvernements pour améliorer notre futur, mais nous devons compter sur nous-mêmes. Et tous ensemble, nous y arriverons, nous pouvons préparer l’avenir que nous voulons. Et c’est là, chers élèves, que vous allez pouvoir mettre à profit tout ce que ce que vous avez appris à l’école ces onze dernières années.
Vous savez désormais l’importance de préserver la faune et la flore pour l’avenir de l’humanité. Vous savez désormais vous documenter, vous défendre, argumenter, rédiger. Toutes ses compétences acquises et bien d’autres, vous les mettrez à profit pour prendre soin de vous, du monde et des autres La commune dans laquelle vous vivez partage aussi vos préoccupations d’avenir. Elle se bat également pour léguer aux générations futures une qualité de vie satisfaisante, mais elle a besoin pour cela de l’engagement de ses habitants, jeunes et moins jeunes, donc de vous. Comment s’engager ? Il y a mille façons, que ce soit dans des associations qui se préoccupent de la nature comme le WWF ou Pro Natura, dans des associations qui s’engagent pour un commerce équitable, comme les Magasins du Monde, ou qui soutiennent des projets de développement dans des pays pauvres, ou en participant à des projets au centre de loisirs ou au Parlement des Jeunes.
De plus en plus, vous aurez des choix à faire, des décisions à prendre concernant vos choix professionnels, mais aussi vos choix de citoyens. Cela ne sera pas forcément facile, mais même si ces décisions vous appartiennent, vous continuerez à être aidés, conseillés, soutenus par des adultes, vos parents, bien évidemment, par des professionnels sur vos futurs lieux de formations, mais aussi par des amis. Vous-mêmes vous allez donner des conseils à vos amis. C’est en discutant avec les autres, en confrontant points de vue et idées, qu’on arrive à se forger une opinion. Même si l’on est responsable de son avenir, même si l’école vous a apporté les connaissances qui vous permettent d’être indépendant, vous aurez toujours besoin d’apprendre, vous aurez toujours besoin des autres et les autres de vous. C’est notre destinée commune. En attendant, je vous souhaite d’excellentes vacances et me réjouis de vous retrouver à la rentrée dans les rues de Meyrin pour parler de tout cela si vous le désirez.
Pierre-Alain Tschudi, Maire