En attendant la réalisation du Lac des Vernes
Monsieur le député,
Monsieur le Président du Conseil municipal,
Mesdames et Messieurs les conseillères et conseillers municipaux,
Messieurs les anciens conseillers administratifs,
Mesdames et Messieurs les représentants des services de l’Etat,
Messieurs les mandataires et exécutants de l’ouvrage que nous inaugurons ce soir,
Mesdames et Messieurs les représentants des associations,
Mesdames et Messieurs, chers amis,
Trois sentiments m'animent ce soir, la joie, l’amertume et l’espoir. Trois sentiments que mes deux collègues du Conseil administratif, Monique Boget et Jean-Marc Devaud, partagent, et que je souhaiterais en introduction de cette soirée vous transmettre, Mesdames, Messieurs, chers amis.
De la joie d’abord parce qu'après plus de 10 ans de travaux, certes interrompus, Meyrin dispose aujourd'hui d'une galerie impressionnante d'évacuation des eaux non polluées longue de 2080 m. Pour réaliser cet ouvrage sans trop affecter la population, de nombreux défis ont dû être relevés et de nombreuses prouesses techniques accomplies. Le chantier s'est quasiment fait sans que les habitants ne s'en rendent compte, grâce à une méthode révolutionnaire importunant très peu la population riveraine et le trafic. Seuls quelques puits d'accès étaient visibles. Le reste de l'excavation s'est fait par forage souterrain à l'aide de machines pousse-tubes. C'est donc dans des profondeurs de 5 à 15 m que les travailleurs que j'ai eu l'occasion de remercier à midi ont travaillé ces dernières années. Parfois ils avançaient de 10 m en un jour, parfois lorsqu'ils devaient creuser dans la molasse ils ne progressaient que d'un seul mètre. Il s'agit là d'un des plus grands chantiers de pousse-tubes en Suisse qui arrive à son terme dont les artisans sont à juste titre très fiers. Vous aurez, à l'issue de cette partie officielle, l'occasion unique de découvrir une petite partie de cette réalisation.
Joie aussi, parce qu'au cours de ce chantier pourtant périlleux aucun accident grave ne s'est produit, ce qui indique aussi que les entreprises ont été très attentives à la sécurité. Encore une fois, je leur exprime au nom de la commune de Meyrin toute ma gratitude.
Pourquoi la commune de Meyrin a-t-elle dû engager ces travaux ?
Tout d'abord parce que la loi fédérale nous y obligeait. La Suisse consciente de l'importance vitale de l'eau pour l’homme et la nature, ainsi que de la dégradation et pollution de nos cours d'eau s'est dotée il y a 21 ans d'une loi fédérale sur la protection des eaux. Le but de cette loi est notamment de préserver la santé des êtres humains, des animaux et des plantes, de garantir l'approvisionnement en eau potable, d'assurer l'irrigation des terres agricoles et de sauvegarder les biotopes naturels qui abritent la faune et la flore indigènes.
Pour atteindre ces buts, cette loi exige désormais une évacuation séparée des eaux polluées (eaux domestiques et industrielles) qui doivent être impérativement traitées d'un côté et des eaux non polluées (eaux de pluie) de l'autre qui sont directement déversées dans des cours d'eaux comme par exemple le Nant-d’Avril. Cette loi s'explique notamment par le fait que les stations d'épuration des eaux n'arrivent pas à absorber toutes les eaux en cas de fortes précipitations. Il arrive donc chez nous lors de fortes crues que des eaux polluées mélangées aux eaux de pluies soient directement déversées dans le Nant-d'Avril et y provoquent érosion et pollution. C'est donc non seulement par obligation légale, mais également par conviction que Meyrin s'est attelée à la mise en réseau séparatif de ces eaux. Conviction qu’il fallait au plus vite protéger nos cours d'eau, le Nant-d'Avril et le Rhône. Il semble aujourd'hui incroyable qu'on puisse encore rejeter directement des eaux contaminées dans un cours d'eau comme le Nant-d’Avril qui représente un biotope important dans sa partie naturelle. Il fallait agir au plus vite sachant, comme l’indique un récent rapport de l’office fédéral de l’environnement, qu’avec le réchauffement climatique le nombre de fortes précipitations va augmenter.
La mise en réseau séparatif représente pour Meyrin une tâche plus importante que pour d'autres communes et ceci pour deux raison évidentes, la première c'est que nous sommes devenus une ville avec peu de possibilités d'infiltration directe des eaux et l'autre que le cours d'eaux qui peut réceptionner les eaux non polluées meyrinoises est plutôt en périphérie de notre commune.
Cela explique que les travaux soient plus conséquents à Meyrin que dans d'autres communes. Il faut ici aussi saluer le fait que la plus grande partie des immeubles sont déjà raccordés au réseau séparatif. La galerie d'évacuation peut recueillir les eaux claires de la plus grande partie de la Cité, mais également d'une partie de Meyrin-Village et de la Zone industrielle.
Et c’est à cet instant précis qu’apparaît l’amertume qui vient atténuer la joie. Bien que la plus grande partie de Meyrin soit désormais raccordée à un réseau d'évacuation des eaux non polluées, celui-ci restera pour l'instant un réseau dormant et Meyrin continuera à déverser, lors des gros orages, des eaux polluées dans le Nant-d'Avril. Meyrin est désormais parmi les dernières communes en Suisses à mélanger eaux polluées et eaux non polluées. Aujourd'hui, normalement nous devrions pouvoir également inaugurer le maillon manquant de cet important réseau: le lac des Vernes (situé derrière moi). Ce lac a été imaginé vers 1995, toujours pour répondre à la loi fédérale sur la protection des eaux qui prévoit que, pour protéger des biotopes naturels, des mesures de rétention des eaux doivent être prises afin de régulariser le débit en cas de fortes crues. Pour protéger le Nant-d'Avril, il était donc nécessaire de prévoir un bassin de rétention. Afin que ce bassin de rétention ne protège pas que le Nant-d'Avril, mais apporte également un espace de loisirs, de découverte de la nature et de détente aux Meyrinois il a été imaginé sous forme d'un lac. Depuis cette date, il n'a cessé d'être étudié, contesté, rêvé, revendiqué jusqu'au 14 juin 2004, il y a 8 ans, où il a finalement été plébiscité lors d'un vote populaire. Ce vote, ainsi que le soutien de l'Etat de Genève à ce projet, ont permis par la suite de poursuivre le chantier de la galerie d'évacuation des eaux de pluie qui devait normalement arriver à terme en même temps que le lac.
N'arrivant pas à nous mettre d'acord sur le prix de vente avec un des propriétaires, la Commune a initié une procédure d'expropriation et déposé une demande d'autorisation de construire. A chaque phase, les propriétaires ont recouru. La Commune est disposée à payer pour l'acquisition des terrains un prix qu'une instance neutre estimerait juste, voire même un peu plus si cela permettait de sortir de cette guerre juridique. La sauvegarde de l'eau et de la biodiversité n’ont pas de prix. Mais comme c'est de l'argent du contribuable qu'il s'agit, la Commune ne peut pas non plus se permettre de payer n'importe quel prix. Nous sommes donc aujourd'hui quelque peu amers de ne pouvoir inaugurer qu'un gigantesque ouvrage qui pour l'instant ne sert strictement à rien tant que le lac des Vernes ne sera pas réalisé. C'est pourquoi, nous avons décidé qu'il n'y aura pas de coupé de ruban, que celui-ci n'aura lieu que lorsque nous inaugurerons tous ensemble le dernier maillon du réseau, le lac des Vernes. Toutefois, nous l’avons déjà acheté en signe d'espoir. L’espoir, ce troisième sentiment qui nous anime.
Il faut que je vous dise, que les autorités communales ne se sont pas contentées depuis 2004 de chercher un accord avec les propriétaires des terrains, soit à l'amiable, soit par voie judiciaire, mais ont continué à tout mettre en oeuvre pour améliorer le projet du lac. Le temps qui s’est écoulé (à défaut de l’eau du lac) n'est de ce fait de loin pas que du temps perdu. Je vous invite à l'issue des discours d'aller visiter l’exposition sur le nouveau lac des Vernes, projet 2012, exposition qui se situe vers l'entrée de la patinoire.
Ce lac n'est plus seulement un agréable bassin de rétention qui protège le Nant-d'Avril, ce qui en soit n’était déjà pas si mal, mais il est devenu de plus un véritable biotope, incluant un parcours pédagogique, des postes d'observation de la faune et de la flore, un espace naturel de détente, qui s'inscrit dans la volonté de la ville de Meyrin, de mettre plus de nature dans la ville. Avec le lac des Vernes, Meyrin vient compléter un véritable couloir biologique incluant les marais de Mategnin, la réserve naturelle du bois de la Maille inaugurée récemment, plusieurs prairies inondables, un Jardin alpin bientôt restauré et revalorisé. Les instances cantonales, ainsi que les plus importantes associations de défense de l'environnement comme le WWF et Pro Natura adhèrent au projet et reconnaissent, grâce à cette cohérence, l'importance du lac des Vernes pour la préservation des espèces végétales et animales.
Le lac des Vernes s'est également amélioré au fil du temps grâce au projet d'éco-quartier des Vergers avec lequel il est désormais intrinsèquement lié. L'éco-quartier des Vergers disposera d'un système de chauffage exemplaire que je ne détaillerai pas ici, mais qui nécessite également le lac des Vernes.
Le lac des Vernes, Mesdames, Messieurs, est désormais à la croisée des chemins entre un réseau séparatif qui vise à préserver et améliorer le Nant-d'Avril, un couloir biologique qui vise à préserver la biodiversité et un éco-quartier exemplaires dont il contribue à améliorer l’efficience énergétique grâce au label Minergie A.
J'ai donc le ferme espoir que nous trouverons un accord pour pouvoir réaliser prochainement le lac des Vernes, et avec le lac des Vernes ces différents projets qui nous tiennent tous à coeur.
J'ai donc le ferme espoir de pouvoir prochainement couper le ruban avec vous tous évidemment, mais également avec une famille, propriétaire de terrains, à laquelle je pense fortement ce soir, et qui, je l’espère, sera bientôt réconciliée avec sa Commune.
Je vous remercie.
Pierre-Alain Tschudi, Maire, 22 juin 2012