Construisons ensemble un écoquartier exemplaire !
Les salutations protocollaires d'usage ayant déjà été faites par notre secrétaire général, Jean-Marc Solaï, permettez-moi de vous saluer différement à l'image de ce futur quartier qui se veut différent résolument tourné à vers l'avenir.
Chers constructrices et constructeurs,
chers bâtisseurs et bâtisseuses,
chers futurs habitantes et habitants,
chers futurs visiteuses et visiteurs,
bref chères amies et chers amis de l'écoquartiers des Vergers,
Mon propos tentera d'être bref puisque nous attendons toutes et tous avec impatience depuis 12 ans ce premier coup de pelle qui nous réunit aujourd'hui, et que, de surcroît, des personnalités éminemment éminentes vont encore s'exprimer après moi.
Notre maire a évoqué le long chemin parcouru jusqu'à aujourd'hui, chemin souvent semé d'embûches, mais que nous sommes parvenus ensemble à dépasser puisque nous sommes là réunis aujourd'hui à la veille du démarrage d'un gigantesque chantier.
La commune de Meyrin a su s'entourer d'une équipe compétente et engagée qui a non seulement réussi à surmonter les nombreux obstacles, mais également à susciter l'intérêt et l'envie pour ce nouveau quartier des Vergers. Habitants et élus politiques sont unis dans la volonté de créer rapidement des logements à des prix accessibles dans un écoquartier exemplaire.
L'enthousiasme que soulève ce projet est à la hauteur des attentes. Nous tous ici réunis avons donc désormais la responsabilité collective, mais aussi individuelle de ne pas décevoir ces attentes de la population meyrinoise et genevoise. Mais comment y parvenir sachant que nous ne sommes qu'au tout début de la création d'un quartier qui est appelé à vivre durablement, sachant aussi que nous sommes très nombreux à contribuer à sa réalisation et que forcément, comme dans toute aventure humaine, il y a et aura des divergences de vue, des conflits d'intérêts, des contradictions et donc de nouveaux obstacles ?
Cette question me travaille beaucoup. Encore cette semaine, j'ai pu être témoin de méfiance et de scepticisme des uns à l'égard des autres. Des promoteurs inquiets de voir les coopératives prendre leur place, des coopérateurs inquiets d'être exclus du processus de décision, des professionels inquiets d'être remis en question par de simples citoyens. Des simples citoyens suspectant les politiciens de ne pas prendre en compte leurs besoins. Je sais bien que la confiance ne se décrète pas, mais qu'elle se construit progressivement dans les relations que nous entretenons les uns avec les autres. Elle demande de la volonté, voir de la ténacité et surtout de la patience. Comme pour un immeuble, il faut beaucoup plus de temps pour construire un climat de confiance que pour le démolir.
A partir de ce constat, et observant la multiplicité des acteurs différents engagés dans la réalisation de ce quartier, propriétaires et coopérateurs, promoteurs, financiers, juristes, architectes, ingénieurs, les nombreux services de l'administration communale et cantonale, les élus politiques de la commune et du canton, les futurs habitants et travailleurs du quartier, comment construire ce climat de confiance et de coopération indispensable pour atteindre notre but commun ? Comment créer, dans la réalisation du quartier, l'esprit de coopération et de co-construction qui devra ensuite animer le quartier pour que celui-ci soit véritablement et durablement un écoquartier exemplaire ?
Je ne suis pas allé chercher ma réponse dans des écoquartiers lointains habités par quelques babas idéalistes. Non, je crois l'avoir trouvé bien plus proche, à quelques centaines de mètres d'ici dans un lieu prédestiné et symbolique: dans le Globe de la science et de l'innovation. Ce globe est aujourd'hui non seulement un emblème pour le CERN, mais également pour Meyrin qui, notamment à travers son engagement pour le quartier des Vergers, affirme et affiche sa volonté de créer et d'innover. Le Globe de la science et de l'innovation dont un des deux créateurs est Meyrinois, témoigne d'une architecture novatrice ancrée dans la science et l'innovation. C'est exactement ce que nous souhaitons pour l'écoquartier des Vergers. Le Globe s'est d'abord appelé Palais de l'Equilibre, lors de l'Expo 02, et était dédié au développement durable. C'est exactement ce que nous souhaitons, à savoir trouver dans ce futur quartier, comme ailleurs, un équilibre dans la satisfaction des besoins essentiels, des conditions économiques, environnementales, sociales et culturelles d'existence, un équilibre indispensable à un développement durable qui préserve les composantes de l' écosystème et de leurs fonctions pour les générations présentes et futures. Aujourd'hui, le Globe de la science et de l'innovation est devenu un forum d'échanges et de discussion autour de la science et des grands enjeux de l'humanité. Et c'est dans le dialogue et l'échange que nous construirons progressivement et ensemble la confiance réciproque nécessaire à la réalisation du futur quartier des Vergers.
J'ai souhaité poursuivre ma réflexion et mon enquête sur cette problématique de la co-construction et de la confiance qui est loin d'être facile et qui représente sans doute le plus grand défi que nous aurons à relever, sachant que les autres défis d'ordre technique et économique en découlent directement.
Je me suis donc rendu un soir au Globe de la science et de l'innovation et suis tombé sur une soirée d'une grande entreprise de la construction, présente d'ailleurs également dans notre projet des Vergers. Bon d'accord, j'y avais été invité, mais j'étais très curieux d'entendre ce que des acteurs expérimentés de la construction pouvaient m'apprendre sur la question de la co-construction. Et cela a été fort intéressant. Le CEO, le chief executif officer, a expliqué que le succès fulgurant de l'entreprise reposait sur huit valeurs fondamentales partagés par tous les employés. En l'écoutant, je me suis dit que si nous partagions ces huit valeurs, nous tous ici présents ainsi que les absents également impliqués dans la réalisation du quartier, nous arriverions non seulement à établir un climat de confiance, une culture de la coopération, mais également à répondre aux besoins, aux envies, aux espoirs et aux attentes que nos concitoyennes et nos concitoyens nous expriment tous les jours. Et quels étaient ces valeurs ? (Ce n'est pas du plagiat que de les reprendre puisque j'indique mes sources, il s'agit de Monsieur Anton Affentranger, CEO d'Implenia SA).
Première valeur: la fiabilité, il faut que nos propos, nos projets se basent sur des données étudiées et fiables. Notre futur quartier est unique, chaque réalisation est unique. Pas question donc de pouvoir faire du copier-coller. La fiabilité est donc indispensable pour créer la confiance.
Deuxième valeur: le développement durable. Je ne m'étends plus sur cette notion que j'ai déjà évoquée, qui aujourd'hui non seulement est une valeur fondamentale, mais aussi une obligation légale. Cette obligation ne devrait toutefois pas être vécue comme une barrière qui freine l'ardeur entrepreneuriale, mais au contraire comme un challenge qui stimule l'esprit d'entreprise et l'ambition d'être à l'avant-garde.
Troisième valeur: l'intégrité, indispensable pour créer un climat de confiance. Comme dans ce grand chantier, nous allons travailler côte à côte, voir même les uns sur les autres, le non-respect des règles et des décisions prises, l'absence de loyauté et d'intégrité seraient immédiatement sources de conflits sérieux.
Quatrième valeur: la transparence. Nous construisons ensemble, nous mutualisons pour optimiser les coûts et ainsi produire des logements à des prix abordables. Nous sommes tous interdépendants. Cela ne fonctionnera que si nous agissons dans la transparence, si nous travaillons à livre ouvert.
Cinquième valeur: l'excellence opérationnelle et financière. Nous devonc tous rechercher l'excellence dans ce futur quartier. Si concurrence il devait y avoir c'est bien dans la course à l'excellence. Dans quelques années. Ce quartier sera une carte de visite, une carte de visite pour Meyrin, mais aussi une carte de visite pour chacune et chacun de celles et ceux qui auront apporté leur pierre à l'édifice. La commune fera certainement un livre qui présentera chaque réalisation ainsi que son inscription dans le quartier en rendant hommage aux bâtisseuses et aux bâtisseurs. Je sais, je mets la pression, c'est intentionnel !
Les trois dernières valeurs sont étroitement liées et forment d'ailleurs un tout cohérent avec les cinq premières: L'innovation. Nous construisons un des premiers quartiers du XXI ème siècle pour le XXIème siècle. Nous construisons donc un quartier qui obligatoirement innove puisqu'il se doit de répondre aux problématiques énormes qui interpellent toute l'humanité aujourd'hui. L'excellente nouvelle c'est que des solutions existent, qu'il n'y a donc pas lieu de déprimer, mais qu'en revanche, il faut innover, s'orienter résolument vers la recherche de solutions, prendre des risques. Nos voisines et nos voisins du CERN le savent bien. Ces solutions, on ne les trouve pas tout seul, il faut collaborer, chercher ensemble. On ne peut pas non plus dire à chaque proposition de solutions que ça ne va pas, parce que cela n'est pas ce qu'on a fait jusqu'à présent et sort des « chantiers » battus. On ne peut pas traiter chaque problématique comme si on était seul à devoir trouver la solution. Les solutions existent, mais pour les trouver il faut avoir le courage d'imaginer l'avenir, d'innover, d'être conscient des risques, mais d'en prendre quand même, de se remettre en question, d'entrer en dialogue avec les autres, bref de dépasser une certaine inertie confortable. Bien entendu, on a le droit de douter, c'est même plutôt recommandé. Créer c'est douter. Mais on a pas le droit d'être timoré, paralysé et ainsi de freiner la recherche de solutions. On a pas le droit non plus de se considérer comme le détenteur de la vérité. Aujourd'hui à l'instar des découvertes du CERN, nos solutions nous les trouverons ensemble sans exclusion aucune. Dans la construction, il y a un potentiel gigantesque d'innovation qui contrairement aux idées reçues offrent aussi des opportunités d'économies importantes. Si nous utilisons les déchets de la construction comme matériel de construction, nous évitons les frais d'évacuation des déchets et les frais d'acquisition de nouvelles matières. Si la transformation se fait sur place, nous évitons les frais de transports. L'écologie se révèle soudain économiquement intéressante, sauf évidemment pour ceux qui vivent de ce qui aujourd'hui renchérit la construction. Conscience des chances et des risques, orientation vers les solutions et innovation sont les trois valeurs qu'il me restait à dérouler devant vous.
Si nous arrivons à nous unir autour de ces huit valeurs et créer ensemble une véritable culture de la co-construction et de la confiance, nous franchirons tous les obstacles qui nous attendent dès demain dans la réalisation du futur éco-quartier des Vergers.
La commune s'engage résolument dans ce merveilleux projet. Depuis avant-hier soir, un site (écoquartier des Vergers) spécialement dédié à ce beau projet relate toutes les étapes de cette belle aventure, présente les actrices et les acteurs, annoncent les prochains épisodes et rendez-vous, inscrit l'histoire du quartier dans celle non moins exaltante de la commune de Meyrin. Ce site rayonne déjà sur les réseaux sociaux, bref fait le buzz.
La commune n'a pas épargné ses efforts pour trouver un accord avec les propriétaires des terrains du futur lac des Vernes non seulement pour que la pollution du Nant d'Avril et du Rhône cesse, mais aussi pour pouvoir réaliser pleinement le futur concept énergétique de l'écoquartier des Vergers, qui sera un modèle d'écologie industrielle, comme le stipule notre nouvelle constitution cantonale. Ce futur biotope en marge des Vergers apportera par ailleurs une plus-value non négligeable à tout l'éco-quartier des Vergers.
Enfin, la commune ne pense pas seulement aux futurs habitants des Vergers. Les Vergers ne suffiront pas pour loger nos enfants. Nous soutenons donc les surélévations d'immeubles là où elles sont souhaitables et possibles, mais à la condition que les propriétaires améliorent l'efficience énergétique et réhabilitent les espaces extérieurs de leurs immeubles. La densification de la cité doit profiter et améliorer la qualité de ville de tous les habitants actuels et futurs. Nous ne transigerons pas la dessus. Construire pour nos enfants, oui. Mais des logements de qualité pour eux, ainsi que pour leurs parents.
Nous célébrons aujourd'hui le premier coup de pelle. Pour nous retrouver régulièrement autour d'événements festifs marquant l'avancée du chantier, pour entretenir la flamme et l'enthousiasme qui nous animent, pour nous réconcilier s'il y a lieu, pour intégrer à fur et à mesure les nouveaux protagonistes de cette belle aventure, je vous donne dores et déjà rendez-vous pour d'autres fêtes que nous co-préparerons ensemble cette fois.
Un grand merci à toutes celles et tous ceux qui ont contribué à ce qu'au bout de 12 ans d'efforts nous puissions aujourd'hui donner le premier coup de pioche ou de pelle. Un merci tout particulier à une cheville ouvrière de cette opération ou plutôt de cet accouchement, Monsieur Philippe Maag.
Un grand merci à celles et ceux qui ont préparé cet événement.
Un grand merci à celles et ceux qui, dès demain ou disons plutôt après-demain, vont poursuivre leur engagement pour contribuer à réaliser un éco-quartier exemplaire dans un esprit coopératif et créatif, animé par une volonté partagé de trouver ensemble et dans des délais raisonnables des solutions aux problèmes qui ne manquront pas de surgir.
Ce n'est qu'un début, continuons ensemble à concrétiser ce merveilleux projet.
Vive l'éco-quartier des Vergers, vive Meyrin !
Pierre-Alain Tschudi, conseiller administratif, 21 septembre 2013